TRIESTE

Publié le par christiane loubier

J’ai vu, dans l’ombre des feuilles,
le contour de pays intrépides,
les nombreux oiseaux échappés du soleil
ont volé vers moi,
ils m’ont apppris
l’art de nouer les coques
au-dessus de la mer pliée
et l’un deux s’est posé
sur mes côtes,
m’a exorcisée
et, devant les grottes des colombes,
a conjuré mon étoile.

 


Ilse Aichinger
Le jour aux trousses
 
 
 
 
 
 

 

 
 

 

LE MANCHE

Publié le par christiane loubier

Le manche le plus commode que j’ai connu se
tenait à la porte de l’écurie. C’était un bois d’orme
dont l’écorce rugueuse n’avait pas été enlevée.
À force d’être massé, il avait velouté; chaud
en hiver. Il était devenu doux comme un linge. 
Il était brun. Il s’usait dans la douille. Mon père
le refonçait et le repointait.
 
 

 

Jean Rivière,

Le vent en bas-Poitou,
Écho optique, 1993
 
 

 

 

 

 

 

   

 

SI JE POUVAIS SAISIR UN PETIT RIEN...

Publié le par christiane loubier

Si je pouvais saisir un petit rien
un morceau du rien
toutes choses viendraient à moi
elles qui dansent
dans son étoffe

Si je pouvais 
mordre les choses dans leur plein
je connaîtrais le goût profond du monde

indécise
je me tiens droite au moins

entre mes lèvres
un début de motet
pour fondre la neige
traverser de rythmes la terre…

On entend du temps battre
comme une promesse de vie dans un œuf.
 
 

Marie-Claire Bancquart
Mots de passe, Le castor astral, 2014 

L'OUVRIER DES SONGES

Publié le par christiane loubier


Le ronflement du rabot éveille le pin blanc
et l’artisan dès le matin
modèle sa journée de bois tendre
 
tout à l’heure il fera la pause
ses épaules ne suffisant plus à la peine
et oubliera au sol la jonchée de boucles blondes
la mouture du café mêlera son odeur
à celle du bois neuf
 

il causera avec le voisin de la saison morte
et des enfants partis à la ville
dont aucun n’a voulu de la connivence du bois
q
ui rend si doux les hommes
et bienveillants
 
la chaise réparée à bout de gestes lents
sera la victoire de la matinée
 
ainsi sera conquise la clémence du temps.
 
 
 
© G. Dion

BOIS DEBOUT

Publié le par christiane loubier

BOIS DEBOUT

 

 

                                                                Poésie verticale

 

                                                                Sur blancheur raturée

 

                                                                Poèmes en bois debout

 

 

                                                                                Christiane Loubier

 

 

 

 

 

Photo : Petit bois, Cap Tourmente (Québec)

L'ÉCHARPE

Publié le par christiane loubier

Si je porte à mon cou
En souvenir de toi
Ce souvenir de soie
Qui se souvient de nous
Ce n'est pas qu'il fasse froid
Le fond de l'air est doux
C'est qu'encore une fois
J'ai voulu comme un fou
Me souvenir de toi
De tes doigts sur mon cou
Me souvenir de nous
Quand on se disait vous

Si je porte à mon cou
En souvenir de toi
Ce sourire de soie
Qui sourit comme nous
Sourions autrefois
Quand on se disait vous
En regardant le soir
Tomber sur nos genoux
C'est encore une fois
J'ai voulu revoir
Comment tombe le soir
Quand on s'aime à genoux

Si je porte à mon cou
En souvenir de toi
Ce soupir de soie
Qui soupire après nous
C'n'est pas pour que tu voies
Comme je m'ennuie sans toi
C'est qu'il y a toujours
L'empreinte sur mon cou
L'empreinte de tes doigts
De tes doigts qui se nouent
L'empreinte de ce jour
Où les doigts se dénouent

Si je porte à mon cou
En souvenir de toi
Cette écharpe de soie
Que tu portais chez nous
Ce n'est pas qu'il fasse froid
Le fond de l'air est doux
Ce n'est pas qu'il fasse froid
Le fond de l'air est doux.
 
 

Maurice Fanon (paroles et musique)

 

Chanté ici par Félix Leclerc

 

 
 
 

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